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Le Forum de Davos 2023 à l’ère d’une géopolitique mondiale fragmentée

by Mustapha Maghriti

Créé en 1971, le fameux Forum économique mondial de Davos réunit chaque année le milieu des affaires, responsables politiques et d’organisations internationales, intellectuels, et journalistes afin de débattre des enjeux de la mondialisation, a ouvert son bal hier Mardi à Davos pour sa 53éme édition après deux années de reports et d’annulations pour cause de Covid19.

Le Forum de Davos, qui a longtemps chanté en chorale les vertus du libre échange en  donnant le ton d’une mondialisation heureuse, a entrouvert ses portes dans un climat diamétralement différent : La mondialisation est en panne d’inspiration, la guerre est en Europe, et la géopolitique mondiale érige de nouvelles murailles. 

La normalité n’est plus ce qu’elle était. Les crises foisonnent et s’entremêlent comme l’a souligné le bâtisseur du Forum, Klaus Schwab : L’économie mondiale est accolée à des antagonismes immenses. La croissance s’est essoufflée où selon les dernières prophéties de l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques OCDE publiées hier Mardi 17 Janvier 2023 de l’économie mondiale va subir un coup de frein passant de 3,1% en 2022 à 2,2% en 2023, avant de rebondir à 2,7% en 2024, tandis que la forte inflation s’est généralisée à l’ensemble des pays et des produits et s’avère persistante.

Les ruptures d’approvisionnement énergétique pourraient faire encore ascensionner les prix. Les hausses en cascade de taux directeurs nécessaires pour endiguer l’inflation, accentuent les fragilités financières. La guerre que mène la Russie contre l’Ukraine a provoqué un choc de très grande ampleur sur les prix de l’énergie, sans précédent depuis les années 1970.

L’économie mondiale paie une lourde « fustigation » à la hausse des prix de l’énergie, qui risque de s’aggraver en cas d’insuffisance des stocks de gaz européens et exacerbe les risques de surendettement dans les pays à faible revenu, mais aussi d’insécurité alimentaire.

Dans un tel contexte tumultueux, un rationnement de l’énergie pourrait s’imposer en Europe et les pays du monde entier pourraient en pâtir, sur fond de renchérissement du gaz à l’échelle mondiale. Il en résulterait une atrophie de la croissance et une augmentation des prix en Europe et dans le reste du monde.

En substance, Davos 2023 est acculé à des défis qui se chevauchent et s’entremêlent : la crise climatique, une pandémie mondiale, des conflits armés, l’insécurité alimentaire généralisée, une inflation généralisée et des millions de personnes étranglés par les bas salaires ou le chômage.

D’antan, Davos rêva d’une libre circulation des marchandises et des capitaux, une intégration des chaînes de production à l’échelle mondiale, et de la technologie pour le bien commun, mais, hélas, autant en emporte le vent, s’est heurté à des obstacles géopolitiques mondiales: L’incertitude est partout, le libre-échange, prôné par les ultralibéraux de DAVOS, est mal en point, la guerre hante l’Europe et la récession semble être l’horizon commun à tous.

Pour preuve, le milieu des affaires qui converge vers la Mecque du business est sans boussole où après avoir fait preuve d’un optimisme débordant l’an dernier, les dirigeants d’entreprise sont passés à l’extrême inverse de pessimisme : Près de 80 % des PDG mondiaux anticipent une baisse de la croissance économique mondiale au cours de l’année à venir, selon la 26éme édition de l’enquête « Global CEO Survey » du cabinet PwC réalisée auprès de plus de 4.400 dirigeants de 105 pays et publiée à l’occasion du forum de Davos.

D’ailleurs l’intitulé de la thèmatique de cette année 2023 est très révélatrice   « La coopération dans un monde fragmenté » où le forum de Davos escompte ressouder un monde qui se fragmente et où les participants à Davos analyseront comment le double déclenchement de la pandémie de COVID19 et de la guerre en Ukraine ont ébranlé un système mondial déjà velléitaire.

En somme Davos dans sa 53éme édition n’a jamais été rencogné à des enjeux et des défis aussi inédits qu’en 2023 où le monde se remet d’une pandémie globale, en s’efforçant de contenir les contrecoups ravageurs de l’anathème climatique et surfe dans un typhon géopolitique mondile en Burn-Out suite à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Une invasion qui n’a pas manqué de préoccuper, non seulement le milieu des affaires et les organisations syndicales, mais aussi les différents responsables nationaux et internationaux, réunis au Forum Economique Mondial de Davos, et à leur tête les institutions de Brettons Woods, le Fonds Monétaire international (FMI) qui s’interpellent sur la manière de réprimer ce qu’on appelle la fragmentation géopolitique marquée par un affaiblissement de multilatéralisme et un retour vers le protectionnisme, à même à réformer les systèmes de la gouvernance mondiale, afin de rétablir la confiance et le renforcement de la coopération internationale déjà émiettée.

La Chine et sa « maniaquerie » politique “zéro Covid” : Alors que la plupart des autres pays sont revenus à une situation normale, la Chine est submergée en ce mois de janvier 2023 par une importante vague d’infections et de décès due au Covid19 et la population subit jusqu’à ce jour les affres d’un confinement extrêmement draconien qui ne cesse d’avoir des effets pervers sur l’économie mondiale où le pays est en train de propager ses difficultés d’approvisionnement au reste du monde et attise une géopolitique mondiale déjà compliquée et fragmentée.

L’économie mondiale ne peut se soustraire de l’instabilité  d’une géopolitique internationale dispersée et disloquée battant en brèche la rémission de l’économie internationale, d’autant plus qu’outre la contorsion des finances publiques, du durcissement des politiques monétaires, du regain du protectionnisme et des pressions inflationnistes, suite, notamment, aux augmentations des prix des carburants, d’autres produits d’importation essentiels comme les produits alimentaires et l’épineuse problématique de l’énergie.

Dani Rodrik avait raison de critiquer impétueusement la mondialisation économique portée à outrance, et suggère une explication plus pondérée des raisons pour lesquelles la psychose hyper-mondialiste des gratins et des technocrates a calfeutré les nations dans la réalisation d’objectifs économiques et sociaux légitimes à l’intérieur de leurs espaces nationaux : prospérité économique, stabilité financière et équité.

Dani Rodrik plaide pour une économie mondiale pluraliste où les États-nations conservent suffisamment d’autonomie pour élaborer leur propre contrat social et développer des stratégies économiques à la mesure de leurs besoins.

Au lieu de réclamer des frontières fermées et de défendre le protectionnisme, Dani Rodrik montre comment nous pouvons restaurer un équilibre raisonnable entre gouvernance nationale et gouvernance mondiale et trace une feuille de route d’avenir en proposant des moyens novateurs pour réconcilier les actuelles tendances inégalitaires de la géopolitique et des technologies avec la démocratie et l’inclusion sociale.

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