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Quelle Classe Moyenne dans le nouveau Contrat Social au Maroc ?

by Mustapha Maghriti

Après deux années de Covid19 et dans un contexte économique morose (inflation mondiale induite de la crise en Ukraine qui a eu des répercussions au Maroc, entraînant le renchérissement de plusieurs produits de base malgré les efforts compensatoires de l’Etat, sécheresse) pesant d’un poids lourd sur le quotidien des Marocains via leur pouvoir d’achat, l’étau social se serre et constitue le plus grand challenge à relever pour le Gouvernement de AZIZ AKHANNOUCH dans leur premier mandat.

Le 1er Mai, fête historique des travailleurs à travers le monde, pesa cette année de tout son poids sur l’actualité aussi bien internationale que nationale.

Certes, c’est un acquis et succès politique qu’a remporté le chef de l’exécutif AZIZ AKHANNOUCH scellant un pacte social d’ampleur inédite à travers l’institutionnalisation du dialogue social, les avancées dans la législation du travail et les multiples mesures concrètes en faveur des employés d’autant plus que la sceau de l’accord est intervenue dans une conjoncture nationale et internationale épineuse où le Maroc sort d’une pandémie qui a mis à rude épreuve son économie, ses finances publiques et le Mood des citoyens.

A l’occasion de la reprise du dialogue social, plusieurs mesures phares négociées ont été paraphées entre le chef du Gouvernement et les instances syndicales Marocaines en faveur des classes démunies, mais paradoxalement, marquée par une négligence patente et de taille de la classe moyenne.

Ne faut-il pas souligner, dans cette chronique, que cette frange sociale a été l’une des devises de la propagande des partis politiques lors des élections législatives de Septembre 2021 ?

Aussi, cette classe n’a-t-elle pas été l’un des points mires du programme Gouvernemental du 1er Ministre AZIZ AKHANNOUCH à savoir la dignité du citoyen Marocain érigée en priorité des politiques publiques, l’élargissement de la classe moyenne et le renforcement de son pouvoir d’achat ?

Avouons-le depuis une quinzaine d’années, les réformes fiscales au Maroc laissent entrevoir une faiblesse des mesures spécifiques à la classe moyenne, qui porte tout le poids de l’impôt.

Cette classe moyenne au Maroc a de plus en plus de difficultés à émerger et est contrainte de recourir à l’endettement.

Ce fardeau de la fiscalité pèse laborieusement sur la classe moyenne alors que le besoin d’asseoir un équilibre fiscal et de mettre en place des impôts prenant en considération le pouvoir d’achat de cette catégorie se fait sentir. 

A cet égard, l’outil fiscal n’est-il pas un levier efficace dont il faut user afin de soutenir le pouvoir d’achat de la classe moyenne et, par ricochet, permettre à l’économie Marocaine une dynamique économique et sociale.

Ce constat sur l’effritement de la classe moyenne n’est pas particulier pour le Maroc, il est quasiment général pour d’autres pays à l’exemple des USA, de la France. « la classe moyenne en perte de vitesse » est le 5ème d’une série de publications phares que l’OCDE 2019 propose une analyse approfondie de la situation dans laquelle se trouve aujourd’hui la classe moyenne en tant que groupe économique et social. Il contient en outre des informations sur les pressions et les risques grandissants auxquels ce groupe est exposé.

Les doléances de la classe moyenne sont nombreuses et continuent de grandir dans un contexte marqué par la cherté du coût de la vie, au moment où ses rentrées financières demeurent inchangées alors que les différentes stratégies lancées au cours des dernières années sont en grande partie orientées vers les classes pauvres et vulnérables comme c’est le cas dans le dernier dialogue social du 1er Mai 2022.

Depuis une quinzaine d’années, politiques, sociologues, économistes et autres experts alertent sur son mal-être et pointent le déclin de ses conditions de vie.

A travers les revues de littérature, les économistes et les sociologues ont disserté du rôle déterminant de la classe moyenne dans la préservation de la paix sociale et le développement économique. Toutefois, en dépit de son importance, elle demeure le parent pauvre des politiques publiques, comme l’avait souligné Ahmed Reda Chami, président du Conseil Economique, Social et Environnement CESE, à la Chambre des conseillers, lors de la 5éme  édition du forum parlementaire de la justice sociale contenu dans le rapport du Conseil économique, social et environnement , intitulé « Renforcer et élargir la classe moyenne au Maroc: Enjeux et voies pour une classe moyenne qualifiée, épanouie et entreprenante ».

« L’hypothèse de l’émergence d’une classe moyenne qui représenterait 25% de la population au Maroc est sujette à caution, notamment en raison de facteurs comme la cherté de la vie et la qualité des services publics », selon le mémorandum de la Banque mondiale sur le Maroc à l’horizon 2040

La réflexion sur l’élargissement et le renforcement de la classe moyenne s’impose dans la réussite du modèle de développement Marocain. La préservation et la consolidation d’une classe formée, épanouie et entreprenante, sont primordiaux pour réussir la transition vers un nouveau sentier de croissance économique et de développement du Maroc.

Des mesures doivent être dédiées à la classe moyenne qui demeure le laissé-pour-compte des politiques publiques par l’introduction d’une fiscalité des ménages plus favorable, prenant en compte les personnes à charges et consolidée par des allocations familiales plus en phase avec la réalité socio-économique des familles, dont celle liée au financement de l’éducation des enfants.

Aujourd’hui, dans le nouveau contrat social paraphé entre le Gouvernement et les instances syndicales, la classe moyenne plaide pour l’amélioration de son niveau de vie, principalement via la hausse des salaires et la baisse de la pression fiscale pour les salariés et les fonctionnaires.

Des demandes légitimes, surtout que le dialogue social d’avril n’a rien apporté pour la classe moyenne, au moment où une batterie de mesures ont été prises en faveur de la classe ouvrière, à l’instar de la hausse du SMIG de 10% pour le secteur privé et de 3300 dhs à 3500 dhs pour le secteur public, l’alignement du SMAG, l’augmentation de la valeur de l’indemnisation familiale pour les quatrième, cinquième et sixième enfants dans les secteurs public et privé… et la liste n’est pas exhaustive. Ceci au moment où la classe moyenne continue de porter tout le poids de l’impôt sur son dos, dans un contexte inflationniste qui ravage davantage son pouvoir d’achat.

Certes, le gouvernement a procédé à l’augmentation de la valeur du soutien direct des produits de base, notamment le blé, le sucre, le gaz butane et l’électricité, en vue d’assurer la stabilité des prix, néanmoins, ces mesures sont loin d’arrêter l’hémorragie des dépenses dont souffrent les classes moyennes.

Tout le monde sait que le dynamisme de la classe moyenne joue un rôle essentiel en tant que facteur de croissance et de stabilité économique. Elle soutient notamment la consommation, stimule en grande partie l’investissement dans l’éducation, la santé et le logement, et exerce aussi un rôle majeur dans le maintien des systèmes de protection sociale grâce aux contributions et impôts versés par les ménages.

En outre, « une classe moyenne importante, grâce à sa capacité d’épargne, constitue un puissant levier de financement de l’investissement », nota le CESE dans cette perspective. Son existence, dans le circuit socioéconomique d’un pays, représente un facteur de stabilité politique, puisqu’elle est généralement le reflet d’une plus grande cohésion sociale, d’inégalités moins marquées et d’un ascenseur social en marche.

Au-delà du débat stérile sur la caractérisation d’un exercice purement statistique, la  classe moyenne devrait être sous-tendue par un travail de repérage de segments sociaux qui, au regard de leur niveau et mode de vie, leur formation et leurs aspirations, sont les mieux disposés à jouer le rôle de pilier de la stabilité sociopolitique et de moteur du développement économique, social et culturel de notre Maroc.

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