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La croissance économique au Maroc 2017 entre le mythe de l’inclusion et la réalité de l’exclusion

by Mustapha Maghriti

C’était le Lundi 15 Janvier 2017, la publication de la 47ème édition du Forum économique mondial de Davos sur la compétitivité mondiale et le développement inclusif. Faut-il, en prélude, souligner que bien qu’il n’existe pas de définition universellement acceptée de la croissance inclusive, il n’en reste pas moins que celle-ci ne se cantonne pas au seul niveau de la croissance économique. Bien au contraire, la croissance inclusive accorde une attention singulière à la qualité de la croissance, sa durabilité et sa capacité à profiter à de larges couches de la population.
Qu’en est- il de l’économie Marocaine en matière du développement inclusif ?
En se basant sur une pondération qui s’étaie sur trois piliers, à savoir la croissance et le développement, la participation de la main-d’œuvre et la productivité et l’espérance de vie, sur un panel de 78 pays, le Maroc a été classé à la 45ème place derrière la Tunisie 44 éme et avant la Jordanie 54 éme, l’Egypte 55 éme place. 
Selon le document Suisse, le Maroc occupe la 64ème place en matière de croissance et de développement et la 25ème en équité intergénérationnelle. Le rapport a dénoté, par ailleurs, que notre pays se positionne à la 27ème place sur 34 en matière d’éducation et des compétences avec un score de 3.53, 26ème sur 37 en terme d’emploi avec un score de 3.89 et 23ème sur 37 dans le domaine de l’intermédiation financière et des investissements économiques réels et la 35ème dans le domaine de l’inclusion. 
Difficile avec un tel classement prétendre être candidat au peleton des rangs des pays à économie inclusive. Dans ce contexte et dans la configuration des métamorphoses qui traversent la planète et notre région en particulier, le défi pour le Maroc est non seulement de foisonner les opportunités de création de richesse et d’emplois, mais d’en assurer le bénéfice aux plus larges couches de la population.Le Forum a épanché, par ailleurs, que notre pays se positionne à la 27ème place sur 34 en matière d’éducation. Ce classement du Maroc atteste de la quadrature du cercle du développement humain au Maroc .

Le dernier rapport des Nations Unies sur le Développement Humain PNUD a positionné notre pays au même rang, ceci est d’autant plus pertinent que ledit rapport a été établi sur la base des statistiques officielles conceptualisées par des institutions nationales quoiqu’il est difficile de se prononcer sur les rapports et études internationaux, car nombreuses sont les questions que suscitent des polémiques au niveau de la méthodologie, des critères et des définitions ainsi que de l’interprétation des chiffres. Pourtant, les résultats de l’étude du Forum Economique Mondial de Davos demeurent analogues à ceux révélés par nombre de rapports nationaux et internationaux. 
La croissance économique enregistrée ne se reflète pas en termes de développement humain et matériel. L’augmentation des volumes des échanges et des investissements étrangers plus importants au cours de la dernière décennie n’ont pas bénéficié du fléchissement de la pauvreté et du chômage et de la précarité ; Les progrès réalisés en termes de performance macroéconomique sont compromis par un manque d’inclusion dans le modèle de croissance. Les populations rurales restent embobinées dans la pauvreté, la précarité et la déréliction, et dans les villes, la fracture urbaine croissante laisse de nombreux citadins exclus des avantages de la modernisation et de la vie en ville, sans emplois et sans revenus. Non seulement la croissance n’a pas réussi à procréer des dividendes en termes de développement humain, mais il a pu contribuer à l’ exaspération des disparités extrêmes de la qualité de vie et des inégalités stupéfiantes qui empêchent moult Marocain de réaliser leur potentiel. En d’autres termes, en dépit de la croissance enregistrée et des progrès réalisés dans les domaines de la santé et de la lutte contre la pauvreté, le modèle de développement marocain reste accolé aux limites de ses capacités inclusives, notamment en termes de création d’emplois décents et de réduction des inégalités sociales, spatiales et de genre.

A cet égard, moult rapports du Haut Commissariat au Plan HCP relatifs aux inégalités et disparités sociales et économiques corroborent et montrent que malgré les avancées notables du taux de croissance économique, le Maroc reste encore loin de la mise en œuvre d’une véritable économie inclusive. 
Sur ce sillage et dans le discours Royal du trône à l’occasion du 15 ans de règne, le Souverain Marocain ne s’est-il pas interrogé de manière chevaleresque et magnanime en posant des apostrophes sur la schizophrénie et de la dualité du modèle économique marocain ? Le Roi Mohammed VI n’a-t-il pas reconnu que la richesse économique de la Nation ne profite pas à tous les citoyens ? Les tournées royales, les manifestations de pauvreté corroborent, aux yeux du Roi Mohammed VI, l’ampleur des distorsions et disproportions sociales entre les 35 millions de Marocains.
Les 15 ans de dynastie constituèrent, pour le Souverain Marocain, une heure de vérité pour mettre les pleins phares sur la géographie et la cartographie de la richesse marocaine. Une richesse mal répartie a déploré le King Marocain. Le Roi l’appréhenda bien : les comptes sociaux nationaux ne donnent qu’une image réductrice et tronquée en cas d’évaluation pour la construction d’une stratégie économique nationale. Pour en apprécier toute la richesse, il est incontournable de savoir analyser son capital immatériel à même d’affiner la fibre sociale, d’uniformiser géographiquement et sectoriellement le développement du Maroc.
C’est la raison pour laquelle, la conception des politiques publiques ne devrait plus prendre en compte uniquement la croissance stricto-sensu, mais s’intéresser également aux concepts de bien-être et d’inclusivité.

Le Maroc a désespérément besoin d’une autre voie de croissance pour relever les challenges à la fois d’inclusion et de durabilité. Pour atteindre une croissance inclusive, les dirigeants et les décideurs doivent mettre en place des politiques et des institutions, soutenues par la bonne gouvernance, garantissant que les résultats élevés de croissance économique aboutissent à un plus large accès aux opportunités socio-économiques durables pour un plus grand nombre de personnes, en protégeant les groupes les plus vulnérables de la société Marocaine.Un engagement à émousser les inégalités est un Must et il faudrait trouver les moyens de s’attaquer aux disparités sociales liées à la richesse, au sexe et au clivage rural-urbain ainsi que de faciliter la mobilité économique et sociale en fonction de la croissance. L’Initiative Nationale de Développement Humain INDH, certes méritoire, créatrice d’activités et génératrice de revenus, mais ne peut, à notre sens, être un succédané à une véritable politique de croissance endogène et des revenus. L’INDH ne saurait être une panacée pour cicatriser la pauvreté. Elle ne peut être qu’une pièce du puzzle du vaste champ de réformes à même d’assurer la croissance et le recul de la pauvreté. Le capitalisme dans lequel s’est engagé le Maroc, en tant que dynamique économique, est d’abord un processus d’extension du marché et du rapport salarial. Mais la dialectique de ces deux rapports, une fois engagée, enfante de façon endogène ses propres limites. La subtile question qui se pose au-delà de l’INDH : Comment assurer un maillage et une articulation cimentée de la dynamique du capitalisme avec celui de la société et les forces productives au Maroc ?

Le développement économique et social inclusif du Maroc doit passer inlassablement par un accroissement massif de la richesse du pays, c’est dire par un enrichissement de sa population afin d’augmenter la consommation et conduire à la croissance. À ce titre, pour Amartya Sen, (prix Nobel d’économie en 1998) « le seul moyen d’y parvenir est d’encourager la croissance économique et pour que la croissance soit durable et équitable, il faut que les pauvres y prennent une part très active » ceci nous incite à déterrer une citation de Nelson Mandela : « La pauvreté n’est pas un accident comme l’esclavage et l’Apartheid, elle a été faite par l’Homme et elle peut être supprimé par des actions communes de l’humanité ».

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